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Soldats de fortune [Ian Cigale]

 :: Duché d'Ortagor
Sam 5 Sep - 21:16
Ses pas s'enfonçant dans la neige faisaient des bruits d'écrasement mou, et menaçaient son équilibre à chaque enjambée et enfoncement. "Putain d'neige, putain d'hiver, putain d'siège," maugréait Côme alors qu'il retournait vers son campement, un sac de grain sur une épaule, une grappe de saucisses sur l'autre, suivit par quelques comparses tout aussi frigorifiés et alourdis par des victuailles que lui. Trois mois, trois maudits longs mois qu'ils se gelaient les miches au bas des murailles d'un Seigneur du Royaume de Cintra qui avait jugé bon d'arrêter de faire des courbettes à son suzerain.

"J'commence à en avoir marre !" râlait un de ses camarade à la voix nasillarde et au nez bouché donc de nombreuses consonnes étaient remplacées par un "b" signe d'un rhume bien avancé. "J'voudrais pas être un nobliaux perso', un pet d'travers et on t'envois une armée à la gueule pour t'apprendre le respect."

"Surtout qu'il a bien choisi son moment le bougre..." soulignait Côme alors qu'il empruntait le petit pont de bois, fait à la va vite, qui enjambait un court d'eau misérable. "Se rebeller en plein automne... pour ensuite se faire assiéger en plein hiver. Faut vraiment être un sacré enfant de putain pour avoir un esprit aussi dérangé."

"C't'enculé doit avoir le cellier plein et doit bien s'foutre de notre gueule pendant qu'nous on crève de froid et d'faim comme des connards en bas d'chez lui." râlait un troisième qui transportait vaille que vaille une botte de paille.

Sale temps pour une guerre, sale temps tout court. La guerre ce n'est pas une activité hivernale. Quand on est bien élevé, en principe, on l'a fait en mars, juste après avoir semé, pour qu'ensuite une fois l'été arrivé et les récoltes ont puisse vite faire la paix et profiter de meilleurs rations. Mais là, non, ce maudit Niklas Kofod, seigneur de Cisdari a décidé de craquer ses coutures et empiéter sur les plats de bandes de son Duc. Mettant ainsi un bordel sans nom dans les environs. Au final, afin de vite lui régler son compte et épargner la chevalerie et l'armée locale, de nombreux mercenaires ont été envoyé pour faire le siège de son Castel. Mais se qui devait être un siège rondement mené est allé de bévue en bévue. Empêtré par le mauvais temps les assauts ont été aussi désordonnés qu'infructueux. La vie de camp infâme. Tout l'automne des pluies torrentielles ont copieusement noyé les environs, offrant une vie de paludier aux soldats en poste. Puis les températures ont chuté, drastiquement, et la gadoue a fini par durcir, la neige tombait à gros flocons. Et les mercenaires détrempés se sont mis à devenir de vrais bonhommes de neige.

Face à toute cette malchance, n'importe qui se serait déjà carapaté, voir aurait retourné leur veste. Mais rien, une drôle de loyauté habitait les assiégeant. Et ce pour une simple raison, l'alcool coulait à flot. Copieusement ravitaillé par le Duc d'Ortagor. Les terres environnantes ont été littéralement livrées en pâtures à ces rustres. Bref, à défaut de dormir au sec et au chaud, les mercenaires restaient bien ivres et occupés, et de fait loyaux.

Retrouvant enfin le confort relatif du campement, et la foule de brasero qui devaient offrir aux assiégés de belles constellations à admirer une fois la nuit tombée, Côme retournait auprès de sa Compagnie d'Aventure, les Limiers du Gros Velen, se faisant accueillir tel un héros alors qu'il dévoilait la grappe de saucisses à ces compagnons infortunés qui se collaient serrés autour d'un feu.

" Voilà enfin d'la viande les gars. Ça va nous changer d'ce gruau et des bouillons sans légumes." Annonçait gaiement Côme, ravit d'être le héros éphémère de sa troupe.

" T'as raté une tentative de sortie, BouteFeu." Disait un homme portant une brigandine et une armure qui aurait eu l'air noble si elle n'était pas autant rouillée et dépenaillée. "Ces enfoirés pensaient qu'avec ce temps on serait plus mort que vif. Mais j'peux te jurer que dans leur iconographies de la peur il y a des mercenaires en haillon."

"L'idée de rentrer au chaud a bien dû vous motiver à les dessouder." Alors qu'il donnait les denrées au marmiton qui ne tardait pas un seul instant pour les mettre dans une marmite bouillante.

"Motivé ?! J'ignore qu'elle diable on avait au cul mais on a presque percé. Ces pétochards ont refermés les portes sur leurs propres gars pour éviter qu'on pénètre l'enceinte ! La victoire nous a échappé du bout des doigts !" Disait l'homme en refermant un point rageur.

Quoiqu'il en soit, malgré ce peu d'action, la situation restait inchangée. Le moral était pas bien haut, et risquait d'aller en se dégradant, les terres environnantes étaient totalement mises à sac et les quelques âmes qui vivent, avec encore un peu de présence d'esprit, prenaient bien vite la poudre d'escampette corps et bien compris. Néanmoins cette sortie avait redonné le goût du sang à l'ensemble de tout ces mercenaires et ces soudards de la pire espèce. Les rumeurs que le Seigneur Kofod avait ses greniers encore plein procurait l'effet inverse que du découragement. Tout ces bâtards en bas voulaient leur cuisse de canard confis, leur coupe de vin, et leur nuit au chaud à côté d'une cheminée crépitante, avec une servante accroché au bras volontairement ou non.

Côme, par son héroïsme de dégoteur de charcuterie, se vit offrir une place de choix proche du feu de camp. Solidement encadré, épaule contre épaule, par ses compagnons, ces derniers se réchauffaient par chaleur commune. Il appréciait bien ces moments, ces sales moments, où la cohésion et la camaraderie étaient véritablement exaltés. Tous étaient logés à la même enseigne. Tous râlaient ensemble, enduraient ensemble, et se soutenaient corps et âme ensemble. C'est dans ces moment miséreux que Côme apprenait qu'il était heureux. Chaque hivers sur les routes, chaque sale moment, lui apprenait à savourer la moindre joie. Du repas chaud à la paillasse sèche et propre. Les mercenaires font du bonheur avec tout se qui traîne.

"Bon !" Disait l'homme qui semblait être à la tête de la Compagnie, "Je vais aller voir les autres intellectuels. Je vais essayer de leur faire rentrer dans le crâne que si on est pas dans ce château avant la fin de la semaine autant mettre les bouts. Je compte pas passer Février ici, ô non ! En attendant remplissez vous bien le gosier de bidoche et de gnôle. Mon petit doigt me dis que demain on retente un assaut !"
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